Pashupatinah

Publié le par Dadouchka

Je prends une douche : cette expédition ma mise en sueur. Puis je bouquine le routard un moment. Pas très loin de Bodnath, il y a Pashupatinath, l’équivalent de Bénares pour le Népal. Comme je passerai la nuit à Bodnath, je décide de commencer par là, je ferai le tour du stupa le soir. Cette fois, je prends un taxi, je négocie un peu, je ne me souviens plus du tarif. A l’entrée de Pashupatinath, ça bouchonne sévèrement, je suis obligée de descendre un peu avant l’entrée du village, et je tâtonne un peu pour trouver l’entrée du sanctuaire. Je commence par descendre le long d’un petit groupe de bâtiments qui ont l’air anciens et abandonnés, en bas on arrive à la rivière (la Bagmati, la même qu’à Katmandou, affluent du Gange et à ce titre rivière sacrée), où il y a un groupe d’homme et quelques singes. L’un des hommes à les deux pieds des l’eau et ramasse quelque chose au fond de l’eau. Je comprendrai un peu plus tard qu’il récupère les objets précieux des morts incinérés plus haut et qu’on débarrasse de leurs biens désormais inutiles pour eux (des bijoux surtout) dans leur dernier voyage. Mais c’est une voie sans issue, je suis obligée de rebrousser chemin, et grâce aux indications d’un de ces hommes, je trouve la bonne direction. Du moins une des directions possibles, puisqu’en fait j’ai abordé le sanctuaire dans le sens inverse de celui qui est pris habituellement. J’ai suivi un chemin le long de la rivière.

 

Je grimpe un moment un escalier sur la droite du chemin. Des singes (des macaques je crois) occupent l’endroit, de plus en plus nombreux à mesure que je monte. Ce sont des animaux sauvages bien qu’habitués à côtoyer l’homme : il vaut mieux éviter de les approcher. Je finis par faire demi tour, parce que tous ces animaux pleins de dents et de griffes qui crient autour de moi, ce n’est pas tellement rassurant. J’essaie de prendre en photo un bébé en me rapprochant mais je me fais chasser vite fait par la mère, plutôt agressive. Je continue donc le long du chemin. Sur ma gauche dans la rivière, une bande de gamins tous nus se baigne dans la rivière. C’est sûr que vu la moiteur environnante ça ne doit pas faire de mal, mais quand on voit la couleur de l’eau… Heureusement comme on est en amont de Katmandou, c’est quand même moins pollué que dans la capitale. Un peu plus loin, à droite, un groupe de bâtiments. En m’approchant, j’entends de la musique et j’aperçois un cortège, avec des musiciens, des femmes en saris portant des plateaux : c’est un mariage. Quelques mètres après, un temple de Shiva sur la droite, devant lequel un autre couple de mariés, littéralement enguirlandés et pas très souriants (mariage arrangé ?) posent pour leurs familles, et une bicoque à gauche : un point d’information pour les touristes. J’y paye mon entrée : je n’ai fais que longer le domaine sacré, c’est seulement maintenant que je vais y entrer. Le long du temple, je prends un escalier qui serpente en grimpant sur la pente. La encore pas mal de singes. Je flippe un peu quand un gros mâle avance vers moi en vociférant et en crachant. Mais je finis par me rendre compte qu’il s’adresse en fait à un autre mâle derrière moi. Et ça se fini en grosse bagarre : impressionnant, ils ne mesurent pourtant pas plus de 60 cm. Arrivée en haut, j’atteins une zone de petits temples abandonnés dans lesquels nichent les singes. De petits marchands vendent des biscuits, heureusement : j’ai faim. Mais je suis obligée d’attendre d’avoir dépassé cette zone pour ne pas me faire piquer mon casse-croute ! D’ailleurs je me demande comment font les marchands pour ne pas se faire attaquer. Cet endroit est très calme, peu de touristes ou de pèlerins, une atmosphère de ruine romantique à l’orientale. Peu à peu je commence à apercevoir des saddhus, des ascètes hindouistes couverts de cendres et vêtus d’orange, qui viennent là en pèlerinage, ou pour distraire les touristes et les délester de quelques roupies. Ils se cachent le visage si on ne leur donne pas d’argent. Un peu agacée par leur comportement mercantile, je ne prends pas de photos. Je peux aussi bien en trouver sur le web comme ici . Je redescends et j’arrive à nouveau au bord de la rivière.

 

Cette fois, je suis au cœur du sanctuaire. C’est l’endroit où les hindouistes viennent incinérer leurs morts. J’ai de la « chance » : juste à ce moment là, une famille vient pour le dernier voyage d’un des siens. Du coup je n’ai pris aucune photo de l’endroit : ça aurait été indécent. Heureusement là encore, le web à la rescousse pour illustrer l’épisode. Alors que je regarde le spectacle en me faisant la plus discrète possible, un jeune homme vient me parler. Il s’appelle Progress, du moins c’est son nom pour les touristes. Il m’explique qu’il travaille ici comme guide, mais que là c’est la fin de la saison, qu’il a gagné l’argent dont il avait besoin alors il préfère sympathiser avec les touristes. Il m’explique un peu le rituel. Le mort est emballé dans un grand drap blanc. On le porte d’abord sur la gauche du site, ou il est lavé avec les eaux de la rivière sacrée. C’est là qu’il est délesté de ses vêtements, et surtout bijoux, qui partent dans l’eau avec les impuretés. Une femme pleure et crie. C’est sa fille me dit on. Elle n’aura pas le droit d’assister à la suite, seuls les hommes assistent à la crémation, seuls les fils accomplissent les rituels. Après les ablutions, le corps, est transporté de l’autre côté, sur la droite, sur un des Ghats, les buchers. Il y en aurait un par caste, ou par catégorie de métiers. Le bucher a été dressé, bois, fagots empilés. Le corps est posé là dans son linceul. Le fils ainé verse de l’eau dans la bouche du mort. Tous les fils font plusieurs fois le tour du défunt. Puis c’est encore le fils ainé qui met le feu aux 4 coins du bucher. Si c’est la mère qui décède, c’est le fils cadet qui accompli ce geste. Ce moment serre le cœur. Mettre le feu à ses parents, ça ne doit pas être évident.

Après ça je fais le tour du reste du sanctuaire. Il y a pas mal de pèlerins, les hommes  sont enveloppés dans de grands saris blancs. Beaucoup viennent d’Inde. Il reste à voir un joli petit temple, pagode à deux toits, aux étais ornés de sculptures érotiques, et surtout le grand temple doré dédié à Shiva sous l’avatar Pashupati, qui donne son nom au sanctuaire. Seuls les Hindouistes peuvent y entrer, je ne peux que voir l’immense taureau nandi, le même que devant tous les temples du Dieu, son véhicule, mais en dix fois plus gros.

A la sortie du site, Progress me montre un centre social pour les personnes âgées défavorisées : il est financé par l’état et ce sont des médecins et des infirmières bénévoles qui viennent prendre soin des pensionnaires. C’est un peu glauque que le centre soit juste à côté des ghats, un peu comme si on construisait une maison de retraite au bord d’un cimetière… D’ailleurs il y a aussi un hôpital dont les fenêtres donnent sur les buchers, où les gens viennent s’éteindre. Il faut sans doute avoir la certitude de renaître, comme les hindous, pour ne pas trouver cette proximité morbide. Dans le centre, le petits vieux dorment dans des dortoirs, sur des paillasses ou à même le sol en fonction de leurs maigres possessions. Les nouveaux arrivants récupèrent les objets des derniers morts. Mais c’est vivant : dans une cours il y a une fontaine où ils viennent laver leur linge, ils font eux même leurs repas dans une cuisine collective, et l’essentiel de la vie se déroule dans un patio où les infirmières prennent soin d’eux, l’une d’elle rase un vieux monsieur, une autre promène une veille dame. Le plus dingue, c’est qu’on visite ça comme un temple ou un musée, l’entrée est grande ouverte aux passants. C’est aussi un endroit pour exercer la charité pour les pèlerins.

Publié dans Voyage Népal

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